[Test] Ni no Kuni II : un RPG classique mais pas désuet

Nous sommes en 2018 et le J-RPG n’est plus le même qu’il y a quinze ans. Des jeux comme Persona 5 ont aidé à dépoussiérer le genre, qui semble s’être détaché des jeux de l’ère Playstation 1 et 2. Cependant, Ni no Kuni II a décidé de ramener d’anciennes mécaniques et de les remettre au goût du jour, avec ma foi d’assez bons résultats.

Secrets of Evermore

Ni no Kuni II n’a pas grand chose à voir avec le premier épisode. Ici, nous suivons les pas de Roland, le président d’une nation assez proche de celle des États-unis, téléporté dans un monde de fantaisies dans lequel il va aider Evan, le roi déchu du royaume de Ding Dong Dell, à créer un nouveau royaume nommé Espérance (Evermore en anglais). Charge au joueur de recruter de nouveaux sujets, de convaincre les autres nations de rejoindre une alliance internationale pour la paix dans le monde et d’affronter une menace obscure venue des ténèbres.

Un voyage du héros assez classique du genre, qui verra le jeune Evan grandir et prendre conscience des bonnes qualités nécessaires à un gouvernant, avec Roland comme guide. Petit à petit, ces deux chefs d’État vont rencontrer de nombreux personnages, certains centraux à l’histoire, d’autres beaucoup plus anecdotiques, dans un univers très coloré, rappelant les productions Ghibli (qui avaient travaillé sur le premier épisode) et qui à l’avantage de changer un peu des sempiternels mondes de fantasy que le RPG japonais charrie. Certes, le scénario est manichéen, cependant ce n’est pas débilement enfantin : les motivations de tous les acteurs sont établies et même les big bad ne se réduisent pas à des méchants caricaturaux.

En plus de sirènes, on a des hommes-chats (un peuple dont Evan fait partie), des chiens et des souris humanoïdes et des humains, bien sûr. Les environnements eux-mêmes sont assez travaillés, avec plusieurs paysages très jolis, des villes dépaysantes, comme Hydropolis (au thème musical envoûtant) et des donjons qui parviennent à se démarquer de la masse.

ni no kuni II
Par exemple, la forêt de Niall, rencontrée dans les premières heures de jeu, n’est pas qu’une simple forêt. Parce qu’il y a des guirlandes aux arbres. Oui Madame !

Bref, tout va bien, le jeu démarre tambour battant, ce qui fait du bien étant donné l’appétit des J-RPG pour les introductions longues et bavardes. On progresse avec Evan et Roland jusqu’à la fin du premier donjon, on arrive sur la carte du monde, on essaie de se repérer avant de trouver un passage vers…

… OH MON DIEU UNE CARTE DU MONDE ! EN 2018 !

Hé bien oui, Ni No Kuni II réhabilite cette bonne vielle world map, quasi-disparue depuis l’époque PS3-360-Wii, sur consoles de salon. La seule différence, c’est que les personnages y sont représentés avec leur visage super-deformed, un peu comme dans le temps (ou bien comme une figurine Funko-Pop). Une carte bien pensée d’ailleurs, puisqu’elle permet d’accéder aux villes et aux donjons et elle recèle plusieurs lieux plus ou moins cachés et des items qui rendent l’exploration intéressante (même chose pour les donjons, d’ailleurs). On y trouve aussi des monstres corrompus plus puissants que les autres, qui constituent une quête annexe à part entière. Et en terme de combats, il y a de quoi faire.

Des combats intéressants à plus d’un titre, mais une difficulté trop légère

Les affrontements de Ni no Kuni II sont réminiscents de ceux d’un Tales of : une arène de combat créée lors de chaque escarmouche (pas de rencontre aléatoire, on doit toucher un ennemi pour l’affronter) renferme nos personnages et leurs opposants, dans laquelle nous pouvons nous déplacer librement, attaquer, utiliser des objets à volonté et des coups spéciaux qui rappellent les Artes de la franchise de Bandai Namco. Un gameplay très agréable, qui souffre cependant d’un manque de difficulté flagrant : mis à part les ennemis « corrompus » évoqués plus haut, aucun ennemi ne devrait pouvoir vous inquiéter si vous farmez régulièrement. Le jeu essaie de vous manipuler en augmentant le niveau des ennemis plus rapidement que le vôtre, sans que cela n’affecte réellement le défi qui vous est proposé. Ce qui rend tous les petits à côté du jeu, comme la gestion des petits esprits qui vous accompagnent en jeu, très optionnelle. Même chose pour la tablette qui permet d’influencer les loots d’après-combat ou le type de monstres contre lequel vous pouvez faire plus de dégâts, qui s’avère vite superflue.

De plus, dans Ni No Kuni II, des batailles rangées se rajoutent aux combats réguliers. Ces escarmouches sont pour la plupart optionnelles, ce qui pourra vous poser problème si vous ne faites combattre vos troupes que de temps en temps pour grinder l’expérience nécessaire aux deux trois combats d’armée qui émaillent le scénario principal. Evan y mène une armée de quatre unités, constituées de vos sujets : le nombre d’unités augmentera donc avec votre royaume, ce qui vous poussera à choisir une composition type et à vous y tenir, le niveau des nouvelles unités ne suffisant pas toujours. Ce mode de jeu est lui aussi bien pensé, la nécessité d’équilibrer les guerriers, les archers, les mages et les formations plus utilitaires rend le challenge un peu plus élevé par rapport aux joutes habituelles. Comme quoi, reprendre la partie stratégique des Suikoden et y inclure un volet action, qui nécessite d’utiliser en temps réel les compétences de vos troupes, était une bonne idée.

Et bien heureusement, ce n’est pas la seule chose que ce jeu emprunte à la sage de Konami. Car il est désormais temps de s’attaquer au plat de résistance : votre royaume.

ni no kuni II
Roger ? Roger ? Tu es sûr, pour le dispositif de surveillance ? Non parce que là, je crois que les autochtones ont des doutes…

Oh mon Dieu il y a une base comme dans Suikoden, j’hyperventile !

Mon statut de fanboy de Suikoden est bien connu : je vénère cette saga comme nulle autre, et son deuxième épisode est mon jeu vidéo préféré, celui qui m’a donné envie d’écrire sur le medium. Et lorsque des jeux comme Ys VIII ou bien Ni no Kuni II s’inspirent de ses mécaniques, je suis un homme heureux. Ainsi, le royaume d’Espérance s’inspire non seulement des bases des Suikoden, mais il pousse le concept plus loin. Ainsi, vous devez non seulement trouver des personnages pour peupler votre royaume et le faire grandir, ce qui vous va pousser à les chercher, généralement dans les villes, en sachant que certains sont mieux cachés que d’autres. Année 2018 oblige, les personnages recrutables sont très facilement visibles sur la carte du lieu, contrairement aux Suikoden, ce qui n’est pas selon moi un défaut : comme je le disais, certains personnages sont plus durs à trouver et il faudra fouiller partout pour espérer remplir totalement votre royaume. D’autant que certains personnages vous rejoignent dès que vous avez accompli assez de courses pour justifier votre réputation d’homme du peuple, alors que d’autres vous demandent de remplir des quêtes annexes parfois basiques, parfois plus sophistiquées, avec quelques surprises au tournant. Si les personnages sont moins caractérisés que dans les Suiko et pour cause, ils ne sont pas jouables, plusieurs d’entre eux s’avèrent détaillés, ne se réduisant pas à de simples caractéristiques boostant votre royaume.

Une fois recrutés, vos sujets doivent en effet être placés dans les bâtiments que vous avez construits pour eux. À l’intérieur, ils pourront y faire des recherches et trouver des produits utiles de toutes sortes. Les bâtiments en question demandent de l’or pour être construits, or que vous recevez de manière régulière en fonction de l’influence de votre royaume. Chaque recherche, chaque construction et chaque amélioration augmente votre influence et donc l’argent que vous récoltez, produisant un cercle vertueux très attirant : plus vous vous occupez de votre base, plus elle rapportera d’argent (une manne exclusive aux coffres de votre royaume, donc inutilisable pour acheter des objets chez le marchand). Et donc, plus vous aurez de ressources pour la faire croître, ce qui augmentera vos revenus et ainsi de suite. Avec plusieurs paramètres à prendre en compte assez complets (les affinités de chaque personnage pour un métier en particulier, le nombre de sujet maximum à allouer à chaque bâtiment, les contraintes particulières pour débloquer la prochaine évolution d’Espérance), le mode Royaume est une réussite totale, ainsi qu’un investissement qui pourra rejaillir sur vos combats, en groupe comme au sein de votre armée.

Ni No Kuni II est en définitive un très bon jeu, à la difficulté certes trop survolée mais qui propose un bon gameplay et plusieurs modes différents qui se recoupent de manière intelligente. On retrouve ce plaisir, inhérent au genre, d’aller réaliser quelques quêtes annexes après avoir fait avancer le scénario, puis se perdre avec la gestion du royaume et l’exploration des secrets encore inexplorés de la carte du monde. Même si tout n’est pas parfait, Ni no Kuni II rafraîchit un genre ancien qui en avait bien besoin, pour le mettre à disposition d’un nouveau public et l’ouvrir aux secrets du J-RPG. Et rien que pour ça, merci !

ni no kuni II
Votre royaume avec ses premiers bâtiments. Et comme dans Suikoden, le bâtiment principal se trouve en grande partie sur l’eau. J’adore !

Vous aimerez si :

– Vous aimez le J-RPG et les cartes du monde à l’ancienne.
– Vous n’êtes complétionniste que si une récompense suffisamment attrayante est à la clé.
– Vous aimez gérer un royaume et le faire grandir.

Vous n’aimerez pas si :

– Vous n’aimez pas les scénarios manichéens, même si les personnages ne sont pas caricaturaux.
– Vous souhaitez un peu de challenge.
– Vous êtes insensible aux J-RPG classiques, même mis à jour aux goûts actuels.