[Critique] Lost in Space : ennui dans l’espace

Perdus dans l’espace (Lost in Space) est une série de science-fiction en dix épisodes de 60 minutes créée par Matt Sazama et Burk Sharpless. Elle est basée sur la série éponyme des années 1960. Après une anecdotique adaptation au cinéma en 1998, plus de deux ans après son annonce, la nouvelle série de science-fiction de Netflix est enfin disponible depuis le 13 avril.

Les premières impressions ne trompent pas

Pour commencer cette critique, je précise que j’ai regardé tous les épisodes de la première saison du remake de Lost in Space de Netflix.

Je pourrais parler longuement de ce que la nouvelle série fait de bien ou de mal, ou de la façon dont a été mis au goût du jour l’histoire de la famille Robinson ; tirée de la série originale des années 1960. Je pourrais aussi regarder la façon dont le design du titre Lost in Space semble rappeler Lost (la série bien connue de ABC qui fut à l’antenne de 2004 à 2010). Je pourrais même analyser comment la série s’intègre dans le mouvement apparent de Netflix vers une programmation plus favorable à la famille, ou parler de la façon dont je ne suis pas passé loin d’utiliser le terme «reboot feignant».

Mais non. Mes premières impressions de la série, formées dès le premier épisode, ne m’ont jamais trompé. Il y a eu des moments forts et des moments plus faibles dans les épisodes qui ont suivi et ce premier épisode m’a vraiment amené à un point où j’aurais été heureux de voir mourir plusieurs personnages, comme dans les épisodes suivants. Mais rien dans la série ne m’a fait abandonner mon irritation initiale, à savoir que le premier épisode consiste presque entièrement à sauver quelqu’un qui est congelé dans la glace et qu’il a fallu plus d’une heure pour le faire. Lost in Space est l’une des séries de Netflix les plus barbantes que j’ai pu voir.

Lost in space
Papa, il fait froid !

 

C’est simple, si vous enleviez 20 minutes sur chaque épisode, vous auriez presque une série d’aventures familiales plutôt sympathique. Cependant, avec une longueur d’une heure par épisode, la série s’essouffle et s’effondre de telle sorte que les téléspectateurs s’ennuient. Au début du premier épisode de Lost in Space, la série présente une adolescente brillante et courageuse, Judy Robinson (Taylor Russell). Elle est parfaite dans tout ce qu’elle entreprend – c’est une exploratrice courageuse et une sorte de médecin amateur alors qu’elle n’a que 18 ans – mais c’est normal pour ce genre de divertissement pour enfants. J’en suis venu à beaucoup l’aimer, appréciant la façon dont la série distribuait sa caractérisation parmi les trois enfants Robinson, au lieu de tout entasser sur le jeune Will (comme l’a fait la série originale des années 60). Mais Judy se retrouve immédiatement congelée dans la glace en essayant de plonger vers le vaisseau spatial situé sous l’eau pour récupérer une batterie. Et le temps qu’il faut pour la sortir de la glace ne cesse d’augmenter. Et il augmente. Augmente. Augmente…

 

Une tentative ratée, mais de l’espoir

Quelque part dans la structure de l’épisode, je pourrais reconnaître une tentative de faire des choses intéressantes avec le modèle Lost in Space. Quand Will (Maxwell Jenkins) se heurte à Robot, l’une des créations les plus célèbres de la série, la créature est distinctement étrangère et étrange, plutôt que le personnage maniéré de l’original. L’idée que les Robinson laissent derrière eux une Terre qui étouffe lentement (après un impact d’astéroïde) est convaincante, et même si les scènes qui tentent de nous expliquer les fissures du mariage entre John (Toby Stephens) et Maureen Robinson (Molly Parker) paraissent aussi superficielles que possible, j’aime bien l’idée d’un couple à problèmes qui se laisse une chance parmi les étoiles.

Et ai-je mentionné le vilain Dr. Smith, méchant insipide au possible et qui nous donne juste envie de lui coller quelques tartes bien senties ?

Le premier épisode, réalisé par le génial Neil Marshall (réalisateur de certains des meilleurs épisodes de Game of Thrones, ainsi que du formidable film d’horreur The Descent), a plein de bonnes idées pour augmenter la tension alors que la famille se disperse à travers la surface de cette étrange planète pour trouver un moyen de sauver Judy. Il y a une version plus nette et avec plus de tension de cette histoire qui aurait pu vraiment me plaire, qui aurait évité de rendre tout ce plot maladroit pour lui donner un lustre élégant et moderne qui aurait pu la détourner du simple divertissement familial. Au lieu de cela, l’épisode ne trouve pas de « groove ». Chaque fois que la tension monte, ça coupe. Puis on passe à autre chose pendant un long moment, en ne faisant que commencer à créer de nouvelles tensions par à-coups. Et puis quand il semble enfin que ça va quelque part, ça coupe encore une fois.

Je comprends en quelque sorte ce que les auteurs de la série ont voulu faire ici. Ils veulent souligner la dynamique de la famille Robinson (qui comprend également Penny, joué par Mina Sundwall), ainsi que le monde dans lequel ils vivent. Un monde où une tentative désespérée de coloniser des planètes en orbite autour d’Alpha du Centaure (le plus proche système d’étoiles du soleil) aboutit à un mystérieux accident qui dépose de nombreux colons – et pas seulement les Robinson – sur une planète étrange et inexplorée avec beaucoup de façons d’entraîner la mort d’humains fragiles. Mais le frisson de l’exploration, ou l’examen de la dynamique familiale, n’a jamais l’air de surgir organiquement de l’action, de la façon dont avait su le faire le parent le plus évident de la série : Lost. Lost avait intelligemment trouvé des façons de créer des personnages en faisant confronter ses différents naufragés à des situations sur l’île qui reflétaient des chapitres de leur passé. Mais quand Lost in Space fait un retour en arrière, c’est trop souvent pour rester dans l’exposition et ne jamais aller dans le fond.

Lost in space
Robot, l’un des seuls points positifs de la série.

 

Mais ça reste trop mauvais. Il y a beaucoup de choses à aimer dans Lost in Space, de la performance étrange et vaguement décalée de Posey, à la réorganisation étonnamment intrigante de Robot en tant que menace extraterrestre potentielle (au lieu de juste le meilleur ami de Will), à la façon dont la série arrive à rendre attachant un poulet (oui, un poulet). Et dans le neuvième épisode de la saison, j’ai même pensé, brièvement, que ça pourrait aller quelque part, car il m’a surpris avec quelques solides rebondissements que je n’avais pas vu venir. Mais en même temps, une trop grande partie de la série se sent comme figée sur place, attendant que tous les autres trucs soient pris en charge pour que l’histoire puisse reprendre. Il y a une version de Lost in Space divertissante, mais on a l’impression que les producteurs de la série ne l’ont pas encore trouvé. Ils sont encore en train d’ébrécher le bloc de glace à la recherche de la bonne histoire cachée à l’intérieur.

 

Critique initialement écrite pour l’émission Hyperlink de VL média, dont voici le replay :